Résidence habituelle: la présence de l'enfant est un critère indispensable.

Publié le : 15/02/2019 15 février févr. 02 2019

Les faits concernent un mariage arrangé dans un Etat tiers: une mère bangladaise, épouse d'un britannique, soutient qu'elle était retenue de force dans son village natal au Bangladesh avec son enfant mineur, né dans ce pays. Elle a saisi la juridiction anglaise pour que cette dernière ordonne des mesures de protection de l'enfant et son retour avec l'enfant au Royaume-Uni. Si la mère a vécu quelques mois au Royaume-Uni, tel n'a pas été le cas de l'enfant, qui n'y a jamais séjourné. Ayant des doutes sur sa compétence, la juridiction anglaise a interrogé la Cour de Justice de l'Union Européenne, d'abord sur le point de savoir si la présence physique dans un Etat constitue un élément essentiel de la résidence habituelle au sens de l'article 8 du Règlement Bruxelles II bis, ensuite, sur l'incidence éventuelle des violences faites à la mère, de l'atteinte aux droits fondamentaux de cette dernière et de l'enfant. L'avocat général devant la Cour de Justice avait demandé à celle-ci de considérer que, compte tenu de l'atteinte gravissime portée aux droits fondamentaux de la mère et de l'enfant, qui se retrouvaient dans une situation où ils étaient contre leur gré, retenus dans un Etat tiers, la notion de résidence habituelle pouvait être élargie. La Cour de Justice de l'Union Européenne a considéré que l'article 8 §1 du Règlement Bruxelles II bis, qui établit une compétence générale en matière de responsabilité parentale en faveur des juridictions de l'Etat membre dans laquelle l'enfant a sa résidence habituelle, est fondé sur le critère de proximité. La Cour a maintes fois interprété cette notion de résidence habituelle, qui est autonome, en insistant non seulement sur la présence physique de l'enfant, mais également sur le fait que cette présence ne doit pas présenter un caractère temporaire ou occasionnel. Elle a donc considéré que la présence physique dans l'Etat membre dans lequel l'enfant est prétendument intégré est une condition nécessaire préalable à l'évaluation de la stabilité de cette présence; s'écartant de la position de l'avocat général, la Cour de Justice de l'Union Européenne a considéré que les circonstances particulières de l'espèce, de même que les éventuelles atteintes aux droits fondamentaux de la mère et de l'enfant, ne justifiaient pas une solution différente. Autrement dit, pour la Cour de Justice, le Droit Européen applicable en la matière, c'est-à-dire l'article 8 du Règlement Bruxelles II bis, ne permettait pas de justifier la compétence d'une juridiction d'un Etat membre.   *   *   *   Cette position peut sembler stricte, mais elle est peut-être justifiée par le fait que le Règlement Bruxelles II bis contient d'autres règles de compétence, notamment celle de l'article 14, qui précise que lorsqu'aucune juridiction d'un Etat membre n'est compétente en vertu des articles 8 à 13 du Règlement, la compétence est, dans chaque Etat membre, réglée par la loi de cet Etat. Il y aura donc, dans ce cas, un renvoi au Droit National, et en application de son Droit International Privé National, le Juge anglais pourra éventuellement se saisir de la difficulté et rendre une décision sur le fond.   Cour de Justice de l'Union Européenne – 1ère chambre, 17 octobre 2018 – Affaire C-393/18

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