What does my Will say ?
Auteur : Noémie LE MOUALLIC
Publié le :
06/07/2023
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07
2023
Dans un arrêt rendu après cassation, la Cour d'appel de Lyon a jugé qu'un testament international peut être écrit en une langue quelconque, même si cette langue n'est pas comprise par le testateur, car aucune disposition de la Convention de Washington du 26 octobre 1973 ou de la loi uniforme ne prévoit que le testament doive nécessairement être écrit dans une langue que le testateur comprend, la présence d'un interprète permettant de remédier à ces difficultés de compréhension.
En l'espèce, une personne de nationalité italienne est décédée en 2015 en laissant pour lui succéder ses quatre enfants ainsi que son petit-fils venant en représentation de sa mère prédécédée.
Elle a laissé un testament reçu en français par un notaire en 2002, en présence de deux témoins et d'une interprète en langue italienne, instituant ses trois filles légataires de la quotité disponible.
Le petit-fils de la de cujus a alors assigné ses trois tantes en nullité du testament.
En 2018 le Tribunal de Grande Instance de GAP a fait droit au demandeur en annulant le testament, mais ce jugement a été infirmé par la Cour d'appel de Grenoble en 2020 et le testament validé en tant que testament international au visa des dispositions de la convention de Washington en date du 28 octobre 1973 portant loi uniforme.
C'est en l'état que s'est présentée l'affaire devant la 1ère chambre civile de la Cour de cassation, où la question était de savoir si un testament écrit dans une langue que le testateur ne comprend pas peut être valable.
La Cour de cassation répond par la négative et casse l'arrêt de la Cour d'appel de Grenoble au motif qu'il résulte de la loi uniforme annexée à la Convention de Washington de 1973 qu'un testament peut être écrit en une langue quelconque afin de faciliter l'expression de la volonté de son auteur, celui-ci ne peut être dans une langue que le testateur ne comprend pas, même avec l'aide d'un interprète.
Suite à cette décision de cassation, la Cour d'appel de Lyon a été saisie par déclaration du 29 mars 2022.
Les demandeurs en validité du testament soutiennent notamment que :
- il n'est pas requis par la loi que les témoins aient la capacité de veiller à la régularité du testament authentique,
- à l'époque de la rédaction du testament, la loi française n'encadrait pas le recours à un interprète, ainsi il n'était pas interdit,
- Il s'agirait tout au plus d'une irrégularité formelle du testament, qui n'est pas de nature à remettre en cause sa validité dès lors qu'il est valable au regard des dispositions relatives au testament international, et à l'époque de la réaction du testament, l'intervention d'un interprète était possible selon les conditions fixées par la Convention de Washington.
La partie adverse, elle, soutient, que :
- le testament est nul pour vice de fond car les témoins et le notaire ne comprenaient pas la langue de la testatrice,
- En tout état de cause la testatrice n'était pas assermentée, et rien ne permet de s'assurer de la validité de sa traduction,
- Ainsi les conditions d'application d'un testament international ne sont pas remplies.
La Cour d'appel de Lyon a jugé que le testament ne répond pas aux exigences des dispositions des articles 971 et suivants du Code civil, ainsi il n'est pas valide en tant que testament authentique.
Toutefois, l'annulation d'un testament authentique pour non respect de ces dispositions ne fait pas obstacle à la validité de l'acte en tant que testament international dès lors que les formalités prévues par la Convention de Washington du 26 octobre 1973 ont été accomplies.
Conformément à l'article 3 de la Convention de Washington, un testament international doit être fait par écrit, pas nécessairement par le testateur lui-même, dans une langue quelconque, à la main ou par un autre procédé.
Ainsi il résulte de ces dispositions que le testament international en l'espèce est valable.
Par ailleurs, conformément à l'article 5 de ladite Convention, aucune disposition de droit interne ne prévoyait l'intervention d'un interprète, celle-ci ayant été instituée par la loi du 16 février 2015.
Un testament international rédigé après cette date peut donc toujours l'être dans une langue que le testateur ne comprend pas, cependant la présence d'un interprète assermenté est requise.
La Cour d'appel de Lyon a ainsi infirmé le jugement et déclaré le testament valide.
Il convient cependant de relever qu'il s'agit d'une décision contraire à ce qu'avait décidé la Cour de cassation, ainsi un pourvoi était ouvert aux parties, et la Cour de cassation peut être amenée à se prononcer à nouveau sur cette affaire, en assemblée plénière cette fois.
Source: Cour d'appel de Lyon, 21 Mars 2023 (RG n°22/02394)
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