Père Castor, racontes-nous l'histoire de la reprise des désordres

Publié le : 23/03/2021 23 mars mars 03 2021

Par un arrêt rendu par la 3e chambre civile de la Cour de Cassation, le 28 janvier 2021, la Haute Juridiction a rappelé le fait que les acquéreurs d’un immeuble aient connu, lors de l'achat du bien, la nature des travaux entrepris et l'absence de souscription d'une assureur dommage ouvrage est sans incidence sur la responsabilité des vendeurs dans la survenance des désordres de nature décennale postérieurement à la vente. Par ailleurs, une clause de non recours contre le vendeur en cas de vice de construction contrevient aux dispositions d'ordre public des articles 1792 et suivants du Code civil, qui énonce que "Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère." La décision étudiée concerne le cas d'un "castor", c'est-à-dire d'une personne ayant procédé elle-même à la confection de travaux au sein de son domicile, mettant ainsi en lumière les risques pris pas les particuliers rénovant eux-mêmes leur bien immeuble avant de procéder ensuite à une vente. En l'espèce, Monsieur et Madame AC ont vendu à Monsieur et Madame AG une maison dans laquelle ils avaient entrepris des travaux, y compris la surélévation de la maison. Se plaignant de désordres, Monsieur et Madame AG, après expertise, ont assigné Monsieur et Madame AC en indemnisation des préjudices. Monsieur AA, entrepreneur ayant réalisé certains travaux, est intervenu volontairement à l'instance. Par arrêt de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 10 janvier 2019, Monsieur et Madame AC ont été condamnés solidairement, à l'exclusion de Monsieur AA, à payer certaines sommes en réparation des préjudices subis par Monsieur et Madame AG. La Cour d'Appel a notamment souligné que Monsieur AC a lui-même reconnu avoir personnellement réalisé les travaux de surélévation de la maison et a déchargé Monsieur AA, entrepreneur, de toute responsabilité. Monsieur AC, de par les travaux qu'il a effectués, a ainsi engagé sa garantie décennale. Monsieur et Madame AC se sont donc pourvus en cassation. Ceux-ci daignaient, au sein de leurs moyens de cassation, la qualité de constructeur de Monsieur AC. Par ailleurs Monsieur et Madame AC, au sein de leurs moyens de cassation, énonçaient que l'acte authentique de vente conclu entre les époux AC et les époux AG le 28 septembre 2017 stipulait que l'acquéreur prendrait le bien en l'état où il se trouverait le jour de l'entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur en raison de l'état de construction ou de leurs vices cachés. Par arrêt rendu par la 3e chambre de la Cour de Cassation, le 28 janvier 2021, il a été énoncé que "elle [Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE] a exactement retenu que le fait que les acquéreurs de l'immeuble aient connu, lors de l'achat du bien, la nature des travaux entrepris et l'absence de souscription d'assurance couvrant les dommages à l'ouvrage et la responsabilité obligatoire, était sans incidence sur la responsabilité des vendeurs dans la survenance des désordres postérieure à la vente. Elle a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche, que ces constatations rendaient inopérantes sur l'existence d'une clause excluant la garantie des vendeurs de l'immeuble, que Monsieur et Madame AC étaient responsables de plein droit des dommages atteignant celui-ci." Ainsi, cet arrêt souligne le risque existant lorsque des particuliers réalisent eux-mêmes des travaux de construction au sein de leur domicile. En effet, tel que c'est le cas au sein de l'arrêt étudié, lesdits particuliers, très souvent, ne souscrivent pas d'assurance relative à leur garantie décennale, alors qu'ils ont la qualité de constructeur. Si une vente intervient à la suite de la réalisation des travaux, il est donc désormais acquis que le fait que les acquéreurs de l'immeuble aient connu lors de l'achat du bien la nature des travaux entrepris et l'absence de souscription d'une assurance dommage ouvrage est sans incidence sur la responsabilité des vendeurs dans la survenance des désordres de nature décennale postérieurement à la vente. Ainsi, le fait d'insérer une clause de non recours contre le vendeur au sein de l'acte de vente, dans le cas où des vices de construction apparaîtraient, contrevient aux dispositions d'ordre public des articles 1792 et suivants du Code civil. Un particulier qui souhaite réaliser des travaux au sein de son domicile doit donc impérativement s'assurer afin d'écarter tout risque en cas de vente postérieure du bien.  *  *  *  Source : Civile 3, 28 janvier 2021, n° 19-13.490. Lien : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000043106146?init=true&page=1&query=19-13490&searchField=ALL&tab_selection=all

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