Sur la notion de résidence habituelle d'un époux

Publié le : 15/12/2021 15 décembre déc. 12 2021

Les différents règlements européens, qu'il s'agisse du Règlement dit "Bruxelles II bis" sur la compétence en matière matrimoniale et d'autorité parentale, le Règlement "Aliments", mais également le Règlement "Succession", font de la résidence habituelle des époux ou des parents, un critère majeur et central. Malheureusement, les mêmes règlements ne définissent pas la notion de résidence habituelle et la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne le fait par petits pas. Elle s'est déjà intéressée à la notion de résidence habituelle des enfants, notamment dans le célèbre arrêt "Mercredi" (CJUE 22/12/2010 C-497/10). Pour autant, c’est la première fois, à notre connaissance, que la Cour de Justice statue sur la notion de résidence habituelle d’un époux au sens de l’article 3 du Règlement BRUXELLES II Bis. Elle l’a fait dans un arrêt du 25 novembre 2021, où les faits opposaient une ressortissante irlandaise mariée à un ressortissant français, vivant en Irlande. La mésentente s’installant dans le couple, le mari est parti en France pour y travailler, où il passait toute la semaine, y résidait donc, et rentrait le week-end en Irlande, notamment pour se retrouver avec les trois enfants du couple. Passé un délai de six mois, il a saisi la juridiction française d’une demande de divorce, demande qui a été contestée par l’épouse, au sens où elle soutenait que le fait d’avoir déplacé son activité professionnelle en France ne permettait pas de transférer la résidence habituelle du mari. Le Juge de première instance a donné raison à l'épouse et s'est déclaré incompétent. Sur appel, la Cour d'Appel de PARIS a eu une position plus nuancée et s'est posé un certain nombre de questions, notamment celle de savoir s'il était possible d'imaginer qu'une seule personne puisse avoir deux résidences habituelles, une familiale et une autre professionnelle. Elle a posé des questions préjudicielles à la Cour de Justice de l'Union Européenne, laquelle a répondu en substance que les différents règlements parlaient de la résidence habituelle, toujours au singulier et qu'il n'était donc pas possible pour cette raison d'une part mais également en raison du contexte et de la finalité du règlement, de considérer que plusieurs résidences habituelles pouvaient exister en même temps pour une même personne. Ensuite, la Cour de Justice de l'Union Européenne a considéré que la résidence habituelle d'un époux est caractérisée en principe par deux éléments, à savoir d'une part la volonté de l'intéressé de fixer le centre habituel de ses intérêts dans un lieu déterminé et d'autre part, une présence revêtant un degré suffisant de stabilité sur le territoire de l'Etat membre concerné. La Cour de Justice, au cas d'espèce, a considéré que dans la mesure où le mari exerçait pendant la semaine et de manière pérenne et stable depuis plus de six mois, une activité professionnelle à durée indéterminée en France sur le territoire de laquelle il occupait un appartement aux fins de l'exercice de cette activité, tendait à démontrer que son séjour sur le territoire de cet Etat membre, la France, présentait un caractère stable et permettait en outre de révéler tout au moins une intégration de l'intéressé dans un environnement social et culturel au sein dudit Etat membre. La Cour ajoute que de tels éléments laissent a priori à penser que les conditions prévues à l'article 3 du Règlement Bruxelles II bis pouvaient être satisfaites, même si, comme il se doit, elle a laissé la juridiction nationale de renvoi le soin de vérifier l'ensemble des circonstances de fait propres à l'espèce, afin de considérer effectivement que l'intéressé a transféré sa résidence habituelle sur le territoire français.

 *   *   *   Source : Cour de Justice de l'Union Européenne, 25 novembre 2021, C-289/20.  

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