Eloge funèbre du secret des correspondances entre un avocat et son client.

Publié le : 23/04/2018 23 avril avr. 04 2018

La question du secret professionnel qui lie l’avocat à son client, a été portée sur la scène médiatique à l'occasion d’écoutes de conversations entre un avocat et son client, dont on taira le nom, mais ancien Président de la République.
Contre toute attente, les écoutes ont été validées par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 8 mai 2015 puis par la Cour de cassation le 22 mars 2016.
Crochet du droit.
La Cour européenne des droits de l’Homme, par un arrêt du 16 juin 2016, est elle aussi venue fragiliser le secret professionnel de l’avocat.
En effet, la Haute Cour a estimé que la transcription d’un échange téléphonique entre un avocat et son client, laissant présumer la participation de l’avocat à des faits constitutifs d’une infraction, n’a pas violé la Convention européenne des droits de l’Homme.
Crochet du gauche.
Alors que le secret des correspondances entre le client et l’avocat est à terre, presque agonisant... la Chambre criminelle de la Cour de cassation vient mettre du sel sur les blessures encore fraiches.
La scène de crime est la suivante : un officier de police judiciaire avait mis la ligne de Monsieur X sur écoute, conformément aux instructions du juge des libertés et de la détention.
Au cours de l’une des écoutes, un interlocuteur s’est présenté comme étant l’avocat de Monsieur X, de sorte que l’OPJ avait nécessairement conscience qu’il retranscrivait les échanges de Monsieur X avec son avocat.
Qu’a fait l’OPJ ? Rien. Ou du moins, il a continué ses écoutes.
C’est ainsi que l’avocat en question a pu lire, avec une certaine horreur, ses propos retranscrits dans les procès-verbaux de la procédure.
Confiant dans les principes de son pays, terre des Droits de l’Homme, l’avocat porte plainte pour atteinte au secret des correspondances.
Les juges du fond saisis ont cependant estimé que le délit d’atteinte au secret des correspondances ne pouvait être constitué en l’espèce, puisqu’aucun élément ne permettait d’établir ni l’intention de nuire à l’avocat, ni la mauvaise foi de l’OPJ dans les retranscriptions.
Exsangue, le secret professionnel n’a plus qu’un souffle de vie.
L’avocat fait appel, car en effet, en jugeant ainsi les juges du fond ont ajouté une condition à la loi, puisqu’à aucun moment l’intention de nuire ou la mauvaise foi ne sont prévus par l’article 432-9 du Code pénal (réprimant la violation du secret des correspondances).
L’avocat est néanmoins débouté. Il se pourvoit en cassation et là... Coup de grâce ultime.
La Cour de cassation a suivi la Cour d’appel en estimant qu’il n’y a pas d’atteinte au principe de la libre défense et à la confidentialité des correspondances entre un avocat et son client dès lors qu’il n’existe pas de charges contre l’officier de police judiciaire ayant procédé aux mentions litigieuses d’avoir eu l’intention de porter atteinte au contenu des correspondances protégées entre l’avocat et son client.
Nous avons le déplaisir de vous annoncer le décès du secret des correspondances entre un avocat et son client, le 27 février 2018, disparu au combat, alors qu’il se défendait vaillamment. Source : Cour de cassation, chambre criminelle du 27 février 2018 Pourvoi n°17-81.850

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